Comment j’ai découvert ma vestibulodynie – Épisode 1

Photo tous droits réservés © Marie Albert

“Je me sens coupable”

Je souffre de vestibulodynie (ou dépression de la chatte) depuis un an. Faire l’amour fait si mal que je n’en veux plus. Se soigner ? Compliqué.

|Chapitre 1| “Je me sens coupable”, m’a dit mon copain quand je lui ai parlé de ma vestibulodynie. OK, je peux parler seule de cette douleur vulvaire mais je ne peux pas la soigner sans aides extérieures. D’où les échanges avec mon amoureux et les rendez-vous chez gynécologues, psychologues, kinésithérapeutes, etc. que je dois prendre et que je repousse toujours. Ce n’est pas si grave. D’autres priorités me harponnent : boulot, voyages, famille.

Je ne me souviens pas du jour où j’ai ressenti pour la première fois une vive douleur au sexe. C’était comme une brûlure à chaque pénétration, pendant les rapports sexuels avec mon copain, par exemple. Avec ou sans préservatif. Avec ou sans lubrifiant. Seule la stimulation du clitoris est restée indolore et jouissive.

La première fois que j’ai consulté une gynécologue pour cette douleur, j’ai pointé un endroit “au fond de mon vagin” comme l’origine de ma souffrance. La médecin n’y a rien vu. A l’entrée, en revanche, une partie de la vulve s’est révélée être le vrai point de douleur. Mais cette inflammation est invisible : ma médecin n’a pu poser de diagnostic et je suis repartie du cabinet avec une simple crème anesthésiante comme réconfort.

|Chapitre 2| “Je me sens coupable”, m’a dit mon copain quand je lui ai parlé de ma vestibulodynie. Mais il n’est pas responsable. En cinq ans, j’ai connu sept infections urinaires et autant de mycoses vaginales. Pas assez pour en devenir dingue, mais assez pour craindre les rapports sexuels. J’ai pris des batteries d’antibiotiques, antifongiques, crèmes, probiotiques…

Lorsque ma vestibulodynie est arrivée il y un an, j’ai cru à une mycose, à une conséquence de mes infections, à une incompatibilité entre ma flore vaginale et celle de mon copain. Ce n’est pas vrai mais ce n’est pas faux non plus.

Regardez le témoignage de Shonah dans la série Youtube Cher Corps. Il y a trois mois que je l’ai vu. J’ai enfin pu mettre un nom sur mon mal : vestibulodynie. Cette inflammation du vestibule, une partie de la vulve, s’appelle aussi vestibulite, ou vulvodynie. Quel soulagement d’avoir un diagnostic, après six mois d’errance.

La vestibulodynie apparaît parfois après des infections gynécologiques à répétition : c’est mon cas. La zone se contracte peu à peu et s’inflamme, en prévention des relations sexuelles. Faire l’amour donne l’agréable sensation de brûler en enfer. La lubrification naturelle n’opère plus, les mycoses et cystites se multiplient : le cercle vicieux peut commencer.

Mais l’origine exacte de cette pathologie est inconnue des médecins. D’où mes doutes sur la responsabilité du sexe masculin, celui de mon copain en l’occurrence. Le problème est sous-étudié, pourtant une personne sur six ayant une vulve souffre de vestibulodynie dans sa vie.

Dessin tous droits réservés © Chiliconcacahuete pour Cyclique

Comme le vestibule est une partie extérieure de l’appareil génital, je crains les sous-vêtements – quels qu’ils soient – et les vêtements serrés. J’ose de moins en moins me masturber et pour parler de règles, je supporte moins bien la coupe menstruelle et les serviettes (lavables ou jetables).

Rassurons-nous, je ne vis pas un enfer. J’arrive à faire l’amour de temps à temps et ma douleur disparaît rapidement après les rapports. Je suis contente d’avoir un diagnostic car l’errance médicale est  vraiment pénible.

La vestibulodynie peut se soigner sans médicaments : ce n’est pas une maladie à proprement parlé, c’est une hyper inflammation. Une crème et du lubrifiant apaisent la zone. Des séances chez un.e kinésithérapeute spécialisé.e vont détendre mon périnée, trop contracté par le stress, avec des massages et des exercices de contraction/décontraction à  l’aide d’une sonde vaginale (physiothérapie). Un suivi psychologique ou sexologique peut aussi aider à dédramatiser la douleur. Mais les gynécologues spécialisé.e.s de cette pathologie vulvaire et habilité.e.s à prescrire des remèdes sont rares et chèr.e.s.

|Chapitre 3|“Je me sens coupable”, m’a dit mon copain quand je lui ai parlé de ma vestibulodynie. “Coupable” de me faire mal à chaque pénétration. Sa libido, comme la mienne, en ont pris un coup. Voici nos témoignages croisés sur notre sexualité :

Lui : “Je me sens coupable parce que je te fais l’amour et que tu as mal après. Je suis là donc tu es tentée de coucher avec moi.

Moi : “Tu es le diable de la tentation (rires).

Lui : “Je n’étais pas habitué à rencontrer autant de douleur chez une fille. J’ai plus trop envie de faire l’amour. Je sais qu’il ne faut pas aller trop loin.

Moi : “Le seul moment où je me détends, c’est lorsqu’on est séparés.

Lui : “Parfois, tu mens. Tu ne dis pas que tu as mal parce que tu as envie de baiser. Je m’en rends compte, parce qu’à la fin tu as super mal. Je t’en veux de le cacher.

Moi : “La plupart du temps, je te le dis avant et on arrête en cours de route. C’est tellement frustrant.

Lui : “Je suis allé voir ma médecin pour vérifier si tes problèmes – cystites, mycoses, vestibulodynie – ne viennent pas de moi. Mais elle n’a pas voulu me prescrire de test. Alors je vais voir un urologue bientôt.

Moi : “Tu as d’autres idées pour améliorer la situation ?

Lui : “On avait essayé d’arrêter la pénétration vaginale. Mais on n’a pas réussi.

Moi : “On a tenu une heure, je crois.

Lui : “La pénétration, ça marche bien entre nous. Pourtant, on pourrait faire d’autres choses : se caresser, s’embrasser, des cunnilingus, la pénétration anale…

Cette réflexion m’amène à m’interroger : et si on arrêtait la pénétration vaginale ? Réponse au prochain épisode.

Marie Albert

2018 – Cyclique.fr

P.S. J’écrirai un nouvel épisode lorsque je serai guérie *touche du bois*.

Pour aller plus loin :

  • L’association Les Clés de Vénus présente des traitements à la vestibulodynie et propose une liste de soignant.e.s spécialisé.e.s

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Marie Albert

Aventurière, journaliste et autrice féministe

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